À la manière du metteur en scène catalan Albert Serra et du réalisateur français Virgil Vernier, l’acteur et cinéaste belge Claude Schmitz fait partie de cette nouvelle génération qui s’est emparée des petites caméras numériques pour créer des univers audacieux et raconter des histoires autrement. Refusant à la fois le terme de metteur en scène et de réalisateur, Claude Schmitz voit avant tout ses films comme des aventures humaines et artistiques où il tente de « rassembler des formes atypiques dans des objets atypiques ».

Nous décortiquons son premier long-métrage, Braquer Poitiers, un film tourné sans budget ni scénario avec seulement quatre acteurs + Wilfrid, « personnalité colorée » et propriétaire d’un car-wash se faisant braquer chez lui. Mais ce n’est pas un portrait de Wilfrid qu’a souhaité faire Claude Schmitz : il a filmé l’instant précis du tournage dans une tension entre le documentaire et la fiction, alors que les braqueurs et l’équipe de tournage envahissaient tous deux la maison du poitevin…

Alors comment tourner sans scénario ? D’abord un dispositif simple : une petite caméra choisie pour sa discrétion. Ensuite une équipe rudimentaire : un opérateur caméra, deux ingénieurs du son et Claude Schmitz en ordonnateur de cette troupe — il emprunte le terme au théâtre d’où il est issu. Mais la question du cadre est essentielle dans le film, composé uniquement de plans-séquences. Se méfiant des « belles compositions », le cinéaste belge regarde comment les acteurs se placent dans la scène avant de lancer l’enregistrement…

Cinéphile amateur de Pasolini, Fassbinder et Cassavetes, l’auteur de Braquers Poitiers conçoit le cinéma comme des « vanités », c’est-à-dire le fait de peindre des choses qui sont entrain de mourir. Pourtant ses films, bien vivants, se nourrissent de toute l’énergie de ses acteurs et tentent de répondre à la question : est-il toujours possible de faire communauté ?

00:01:55 — « Rassembler des formes atypiques dans des objets atypiques »
00:05:41 — Braquer Poitiers, genèse d’un film à zéro budget à la rencontre de Wilfrid
00:17:12 — Récit d’un tournage & description de son dispositif en petit équipe
00:32:57 — Se méfier de la composition et bien choisir l’outil-caméra
00:45:51 —  Braquer Poitiers : le montage comme processus lent, long et complexe
00:59:02 — Itinéraire : de la mise en scène de théâtre jusqu’aux films amateurs
01:07:58 — Composer un clip pour un groupe & incorporer de la musique dans ses films
01:13:00 — Le Mali en Afrique, un film pensé comme une des parties d’une pièce de théâtre

Né en Belgique en 1979, Claude Schmitz a étudié à l’école de théâtre et de cinéma  de Bruxelles, l’INSAS . Acteur et metteur en scène sur les planches, il a commencé à réaliser des films tardivement. Parmi ses courts-métrages, Le Mali (en Afrique) et Rien sauf l’été, sortis en 2016 et 2017. Le premier a accompagné une pièce de théâtre intitulée Darius, Stan et Gabriel contre le monde méchant.

Son premier succès en festivals est Braquer Poitiers, étonnant court-métrage devenu long-métrage, sorti le 23 octobre 2019 en salles. Le film a obtenu cette année le Prix Jean Vigo du court-métrage, le prix du public au FID Marseille, le Prix Égalité et Diversité au Festival international du court métrage de Clermont-Ferrand ainsi que le Prix du jury étudiant du Festival des Champs-Elysées. Il a aussi été en lice aux César 2020 en tant que meilleur court-métrage.

Clip réalisé en 2017 par Claude Schmitz pour le groupe « Girls in Hawaii ».